Par Louise Baehr
Astronomes, astrophycisien.ne.s, astronautes,… nombreux.ses sont les scientifiques passionné.e.s par l’immensité qui règne au dessus de nos têtes. Les premiers calendriers datent des civilisations du bassin mésopotamien et les premières conceptualisations de l’Univers, de l’Antiquité Grecque, notamment avec le système planétaire de Platon. Mais les recherches sur l’infiniment grand s’accélèrent depuis le début du XXème siècle. Tant de grands Hommes se sont penché.e.s, ou plutôt, se sont levé.e.s vers le ciel pour en appréhender les mystères. Des calculs théoriques d’Einstein sur la relativité générale découlent des dizaines d’autres découvertes, théories et suppositions toutes plus incroyables les unes que les autres. L’homme a observé le ciel puis marché sur la Lune, et la femme ? Quels rôles les femmes ont-elles joué dans les folles avancées spatiales ? Voici quelques portraits des oubliées de l’Histoire cosmique.
Hypatie (entre l’an 355 et 370 à l’an 415)
Qui de mieux pour commencer cette liste (non exhaustive) que la première mathématicienne, astronome et philosophe grecque ? Puisque cet article porte principalement sur l’espace, concentrons-nous sur ses travaux d’astronomie. A la tête de l’école néoplatonicienne d’Alexandrie, elle y enseigne cette matière avec passion, tout en menant ces propres observations. Elle travaillait notamment à la détermination précise des équinoxes pour ainsi fixer les dates exactes des fêtes religieuses (comme le Jour de Pâques), sujettes à des controverses de la part de l’Eglise. Grâce à ces observations, elle put également mettre en évidence des erreurs que présentaient les travaux de Ptolémée. Hypatie est morte assassinée en 415 par les chrétiens. Qualifiée de sorcière (encore une…) maîtrisant l’astronomie et la musique, non croyante, elle mourût dans d’atroces circonstances. Selon certains, cette mort violente est le fruit de la jalousie d’un évêque alexandrin devant sa popularité au sein de la ville.
Emmy Noether (1882 – 1935)
Connaissez-vous le Théorème de Noether ? Considéré comme tout aussi important que la Théorie de la relativité générale, il est pourtant bien moins connu du grand public. Rassurez-vous, il n’est pas trop tard pour en apprendre davantage.
Mathématicienne connue pour ses travaux en algèbre abstraite moderne, elle a aussi permis d’élucider certaines zones d’ombres mathématiques qui planaient sur la célèbre théorie d’Einstein, en particulier sur les lois de conservation intervenant dans celle-ci. C’est ainsi qu’est né le fameux « Théorème de Noether » en 1915 qui détermine les quantités conservées pour n’importe quel système de lois physiques possédant une symétrie. Il est vrai que ce théorème découle des explications de Noether sur la relativité générale, mais ils s’appliquent en fait à tout système physique, liant les lois de conservation aux symétries et invariances de ce dernier. Parmi les applications de ce théorème on retrouve les lois de conservations usuelles telles que la conservation de la quantité de mouvement, du moment cinétique, ou de l’énergie.
Ces travaux sont plutôt fondamentaux me direz-vous ? Pas si liés que cela à l’espace… Oui, il est vrai, mais sans eux, la science du XXème siècle n’aurait pas été la même…
Dorothea Klumpke (1861 – 1942)
Continuons avec une grande astronome américaine. Ayant fait ses études en France, elle est la première femme à soutenir une thèse en science ayant pour sujet « L’étude des anneaux de Saturne ». Elle fut aussi directrice du Bureau des mesures de l’Observatoire de Paris. Elle réalisa notamment des cartographies célestes et un atlas photographique de 52 régions nébuleuses d’Hershel.
Betty Louise Webster (1941 – 1990)
Cette astronome et physicienne australienne, diplômée d’un doctorat en 1967 sur le thème des nébuleuses planétaires du Sud et ayant travaillée dans plusieurs Observatoires à travers le monde, est connue pour ses travaux avec son collègue Paul Murbin qui ont permis d’identifier le premier candidat clair pour un trou noir (avant cela, ces monstres cosmiques n’étaient encore que des théories papiers, auxquels peu de scientifiques adhéraient). Il s’agit du système binaire Cygnus X-1, puissante source galactique de rayons X, composée d’une étoile variable supergéante bleue et de son compagnon supermassif, un trou noir. Comment ont-ils supposé que c’était un trou noir ? C’est en mesurant en 1971 le décalage Doppler du spectre de l’étoile qu’ils ont pu montrer la présence de ce compagnon. En estimant sa masse, trop élevée comparée à la masse de la plus grande étoile à neutrons possibles, ils ont pensés qu’ils s’agiraient (peut-être) d’un trou noir. C’est en 1973 que ces hypothèses furent confirmées par des observations plus précises, amorçant la découverte d’autres trous noirs, années après années.
Jocelyn Bell (1943 - )
Dans l’Univers il y a des étoiles, des planètes, des nébuleuses… mais ce n’est pas tout, le bestiaire interstellaire regorge d’autres surprises, comme… les pulsars (une étoile à neutrons tournant très rapidement sur elle-même avec période typique de l'ordre de la seconde, voire de la milliseconde et émettant un fort rayonnement électromagnétique dans la direction de son axe magnétique). Leur découverte fait l’objet de controverses. En effet, c’est Jocelyn Bell Burnell qui est à l’origine de celle-ci en 1967, mais c’est son directeur de thèse qui gagnera tous les mérites et obtiendra un prix Nobel. Elle reste pourtant humble en écrivant elle-même en 1979 qu’elle trouve normal qu’un tel prix soit décerné au directeur de thèse et non à son étudiant.e. Après l’obtention de son doctorat, elle travailla à l’Observatoire royal d’Edinbourg, à l’Université de Londres, avant d’être nommée de 2011 à 2004 doyenne de science de l’Université de Bath. Ces travaux durant ces années lui ont ainsi permis d’obtenir bien d’autres distinctions, comme le prix de physique fondamentale, d’une valeur de 3 millions d’euros, entièrement reversées à l’Institut de physique de l’Université d’Oxford en faveur de la création d’une bourse pour aider les étudiant.e.s sous-représenté.e.s en physique : « augmenter la diversité en physique ne peut être qu’une bonne chose ».
Finissons cette liste (toujours non exhaustive) avec un lien plus concret entre femme et espace : oui, parlons de femmes astronautes. La première femme en orbite est la cosmonaute russe Valentina Terechkova en 1963 (seulement 2 ans après le russe Gagarine !), elle a effectué 48 tours en orbite en 70 heures et 41 min.La Nasa n’a ouvert son recrutement aux femmes qu’en 1977. Parmi 8000 candidats, 35 furent retenus, dont 6 femmes. C’est ainsi que Sally Ride fut la première américaine dans l’espace en 1983 à bord de la navette spatiale Challenger. Historiquement, l’aérospatial est un domaine très masculins. Il y a peu de femmes retenues car peut se présentent : 10% des candidat.e.s en 1985, sur les 560 astronautes ayant volé jusqu’à aujourd’hui, il a également seulement 10% de femmes, aux sélections de 2008, 10% aussi. Et ceci, tout simplement parce que les domaines de sélection sont eux aussi majoritairement masculins.
« De plus, la préparation pour être astronaute présuppose de quitter son domicile très longtemps et il est parfois compliqué pour une jeune femme de faire ce choix lorsqu’elle souhaite avoir des enfants ou une vie de famille » J-Y Le Gall, président du CNES
Du fait de cet héritage masculin, les femmes sont parfois confrontées à de petits soucis… comme les combinaisons de sortie extravéhiculaire qui ne sont pas à leur taille. Et ne parlons pas d’avoir ses règles dans l’espace…! Rien n’est prévu pour le faciliter à part la pilule en continu.
Les femmes, l’avenir de la conquête spatiale ?
Après toutes ces années, nous assistons à une féminisation de la profession. En octobre 2019 a eu lieu la première sortie extravéhiculaire 100% féminine ! De plus, sur les 38 astronautes américains aptes aujourd’hui à voler, 12 sont des femmes et les promotions suivantes sont de plus en plus paritaires : 4 femmes et 4 hommes en 2013, 5 femmes et 7 hommes en 2017.
Première sortie extra véhiculaire 100% féminine
« Il est probable que la prochaine personne sur la Lune sera une femme et la première personne sur Mars sera aussi probablement une femme. » J. Bridenstine, administrateur de la NASA
En effet, nous ne sommes pas sans savoir qu’un voyage longue durée vers la planète rouge mettra les astronautes à rude épreuve : enfermés dans des capsules exigües, ils devront supporter, stress, solitude et dépression et il semblerait que pour cela, les femmes soient les sujets les plus adaptés. D’après certains travaux de psychologies, elles seraient plus tolérantes et ferait ainsi régner une atmosphère moins tendues au sein de l’équipage.
Continuons sur cette voie de féminisation du monde scientifique qui nous permet d’aspirer à une parité des postes dans ce milieu, qui ne peut être que bénéfique pour le progrès. C’est main dans la main que les deux sexes doivent travailler.
Note de l'auteure : Je tiens à présenter mes excuses à toutes les femmes scientifiques qui travaillent chaque jour sur des sujets aussi intéressants les uns que les autres et que je n’ai malheureusement pas pu citer ici. L’article serait infini s’il fallait noter chaque contributeur/contributrice aux progrès scientifiques passés et présents.
Sources :
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